Les services et outils numériques référencés dans le catalogue de services de Mon espace santé (MES) peuvent proposer à leurs utilisateurs d’échanger des données avec Mon espace santé, sous certaines conditions conformément au cadre juridique en vigueur. L’objet de cette doctrine est de présenter les conditions d’ouverture de l’accès aux données de Mon espace santé aux éditeurs du catalogue de services numériques en santé.
Elle est construite en collaboration avec les acteurs du secteur pour garantir que Mon espace santé soit le seul carnet de santé numérique universel, souverain, gratuit et sécurisé, mis à disposition de tous les citoyens. Au vu du caractère inédit du catalogue de services de Mon espace santé, la doctrine pourra faire l’objet d’une mise à jour pour couvrir des cas de figure actuellement non décrits.
1. Le rôle central du carnet de santé numérique public Mon espace santé
Mon espace santé est un service public numérique pensé pour accompagner les usagers tout au long de leur vie. Il est hébergé en France dans un environnement certifié HDS, en conformité avec le RGPD, sous la surveillance de la CNIL, garantissant la confidentialité et la non-commercialisation des données. Mon espace santé repose sur un cadre légal clair et robuste permettant à chaque usager de garder un contrôle total sur ses données de santé.
Le rôle du catalogue de services de Mon espace santé
Dans une logique d’Etat plateforme, le catalogue de services permet de proposer à ses utilisateurs des services numériques de confiance développés par des acteurs publics ou privés (prévention, prise de rendez-vous, information sur l’offre de soins, télésanté, etc.). Seuls les services poursuivant les finalités [1] prévues par la loi peuvent être référencés au catalogue, sous réserve du respect d’un certain nombre de critères techniques, d’urbanisation, éthiques, de sécurité et de qualité du contenu. Le processus de référencement permet de s’assurer de la bonne conformité à ces différents critères qui sont définis par arrêté ministériel.
Ainsi, si le Ségur du numérique a permis de réguler et favoriser l’interopérabilité avec les solutions logicielles utilisées par les professionnels de santé au quotidien (dossier patient à l’hôpital, logiciel de gestion de cabinet en ville…), le catalogue de Mon espace santé permet de référencer les applications à destination des usagers et d’ouvrir des perspectives d’échanges de données avec la plateforme nationale dans une philosophie de « donnant-donnant ». Ces deux canaux complémentaires d’alimentation de Mon espace santé visent à répondre à la promesse de redonner la main aux usagers sur leurs données de santé.
Une doctrine d’ouverture des échanges de données à adapter au niveau de déploiement actuel de Mon espace santé
L’essor rapide de Mon espace santé au cours des 3 dernières années constitue une avancée majeure pour les citoyens, les professionnels de santé et les acteurs des politiques publiques. Cette dynamique, déjà bien engagée, appelle désormais à être consolidée pour garantir un service pleinement opérationnel et pérenne.
- Mon espace santé se trouve aujourd’hui à un stade charnière de son développement, avec une alimentation documentaire représentant environ 50 % des documents produits. Ce niveau permet d’ores et déjà de susciter une forte adhésion des usagers et des professionnels de santé, mais nécessite encore des efforts pour offrir une expérience satisfaisante et répondre aux attentes croissantes d’exhaustivité.
- Les flux documentaires déployés témoignent d’un engagement massif des acteurs, mais sa pérennité dans le temps reste un enjeu. Des interruptions ponctuelles d’alimentation, notamment chez certains établissements, laboratoires ou éditeurs, appellent à un suivi renforcé et coordonné aux niveaux national et régional afin de sécuriser la continuité du service.
- Enfin, la coexistence de solutions de gestion documentaires parallèles peut engendrer des incompréhensions chez les usagers comme chez les professionnels. C’est pourquoi nous devons collectivement garantir le rôle central de Mon espace santé en tant que plateforme nationale de référence pour l’accès et le partage des données de santé, dans un écosystème numérique en constante évolution. Les plateformes de prises de RDV ou de préadmission offrent un service complémentaire à Mon espace santé, mais ne sont pas des solutions de stockage pérenne de tous les documents de santé des assurés français.
Pour autant, les échanges ponctuels entre les services utilisés par les professionnels et les patients doivent être facilités pour améliorer les prises en charge médicales. Les modalités d’accès aux données stockées dans Mon espace santé doivent être adressées dans un cadre strict afin qu’elles ne mettent pas en risque cette nécessaire consolidation. Et même, elles y contribuent.
2. Les grands principes : une ouverture des données de Mon espace santé aux services du catalogue progressive et encadrée
Compte tenu des attentes des éditeurs de logiciels, et du besoin important de ne pas créer de circuit alternatif de partage de la donnée de santé, nous déclinons dans cette doctrine le cadre opérationnel et les principes généraux à respecter pour la mise en œuvre de l’échange de données avec les éditeurs référencés au catalogue de service.
Le principe fondamental autour de l’échange de données du catalogue de service de Mon espace santé est que l’ouverture des échanges doit systématiquement s’inscrire dans une logique de « donnant-donnant », ce qui implique que Mon espace santé ne partagera l’accès aux données que si la solution référencée partage en échange des données jugées pertinentes par les pouvoirs publics.
Accès en écriture aux documents
- L’ouverture, en écriture, des échanges de données est d’ores et déjà disponible pour l’ensemble des données suivantes : mesures de santé, documents, éléments d’agenda.
o Tous les éditeurs peuvent ajouter des données dans Mon espace santé. - Dans le cadre des échanges préalables à l’ouverture de l’accès à l’API en écriture, une attention particulière sera portée au risque de doublon (inévitable) pour les documents qui ont déjà vocation à être directement alimentés par les professionnels de santé.
- Cas d’usages potentiels : rapport d’utilisation d’un DM, document envoyé sur une plateforme suite à une téléconsultation, bilan de santé préparé dans une application tierce, auto-questionnaire de santé utile à la coordination des soins, etc.
Accès en lecture aux documents
- Les cas d’usages d’échange de données présentés par les fournisseurs de service doivent être en lien avec les finalités prévues par la loi (prévention, prise de rendez-vous, diagnostic, soins ou de suivi social et médico-social) et pertinents (les documents administratifs sont par exemple exclus du périmètre) ;
- Aucune finalité ne peut supposer le téléchargement exhaustif de l’ensemble des documents stockés dans Mon espace santé. Cette impossibilité doit figurer dans les CGU de la solution référencée et sera vérifiée dans le cadre du processus de référencement.
- Le consentement au partage de documents doit être possible à la maille du document, et à l’initiative du patient dans Mon espace santé.
- Pour les éditeurs qui proposent à la fois une solution côté patient et une (des) solution(s) côtés professionnels qui produisent des documents de santé qui doivent être versés dans Mon espace santé au titre de l’article L1111-15 du CSP, l’accès en lecture aux données de Mon espace santé est conditionné :
– au principe du donnant-donnant (pas d’ouverture unilatérale de MES vers le service) ;
– à la « bonne alimentation » des documents produits par les professionnels et listés au L1111-15 du CSP. Cela est en cohérence avec les obligations réglementaires que doivent respecter les professionnels de santé. Par défaut, la « bonne alimentation » est entendue comme l’atteinte d’un taux d’alimentation des documents de 70%, calculé comme une moyenne pondérée de l’ensemble des documents envoyés pour la (les) solution(s) côté professionnel produisant des documents [2] et souhaitant proposer un accès en lecture à Mon espace santé côté patient. Les établissements et groupements d’établissements éditant leurs propres solutions sont soumis aux mêmes règles que les éditeurs de logiciels s’ils souhaitent proposer ces accès en lecture.
Concrètement :
– Lorsque l’éditeur propose plusieurs logiciels ou versions d’une solution logicielle côté professionnel, la moyenne est rapportée à l’ensemble des LPS de l’éditeur. Cela permet de ne pas pénaliser des éditeurs qui ont des LPS peu déployés ou en cours de suppression du parc.
– Pour les groupes d’établissements (groupe de cliniques privées ou GHT) utilisant une solution de préadmission, la moyenne est calculée à l’échelle du groupe.
– Ce taux est calculé à la maille de l’éditeur, bien que des obligations d’alimentation de Mon espace santé pèsent déjà sur les professionnels de santé à l’article L-1111-15 du CSP.
– Une fois le seuil de 50% d’alimentation dépassé, une phase de suivi renforcé et de collaboration étroite avec l’éditeur peut démarrer, pour sécuriser la trajectoire et les chantiers techniques préalables à l’ouverture des échanges.
– Si le taux de documents alimentés venait à repasser durablement sous le seuil de 70%, les accès en lecture et en écriture, via les API pro et patients, seront coupés.
- L’ouverture, en lecture, aux documents de Mon espace santé pour les éditeurs de services numériques du catalogue se fait progressivement au vu du caractère inédit de la démarche. Il y aura donc deux temps :
– Une phase de mise en application des exigences de la présente doctrine avec des services pilotes puis une phase de généralisation.
– Pendant la phase pilote, les pouvoirs publics expérimentent les règles d’accès, qui seront ensuite adoptées contractuellement en phase de généralisation.
Pour les éditeurs d’applications professionnelles non soumises à cette obligation d’alimentation au titre du L 1111-15 du CSP et qui disposent également d’une solution patient, la doctrine pourrait être précisée dans un second temps si cela s’avérait nécessaire.
API mesures et agenda
- Les accès aux API de Mesures et d’agenda ne sont pas soumis à une exigence d’alimentation. Par conséquent, ces API sont accessibles en lecture et en écriture, sans condition, à tout éditeur proposant un cas d’usage médical et pertinent, c’est-à-dire qui apporte de la valeur aux utilisateurs de Mon espace santé.
Ces règles ont vocation à permettre aux des éditeurs de proposer des services à valeur ajoutée pour les patients sans compromettre le positionnement central de Mon espace santé, comme le carnet de santé numérique, public, souverain et gratuit des Français.
[1] les finalités d’utilisation secondaire (à des fins de recherche) ne sont pas autorisées ; et l’ouverture à cette finalité devra faire l’objet d’un travail ultérieur
[2] Après une analyse détaillée, la plupart des documents versés par les éditeurs de LGC/DPI concernés sont ceux réglementairement exigés dans le CSP.